Renard, un diariste authentique

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« Que de mal on se donne avant de prendre son originalité chez soi, tout simplement ».

Ce court recueil, publié en décembre 2013 chez L’Anabase, s’ouvre sur cet aphorisme ô combien caractéristique du style de Jules Renard. Tirées de son Journal, ces Notes sur le métier d’écrire nous permettent de découvrir un auteur, un homme, loin de l’image d’Épinal laissée par la lecture d’enfance de Poil de Carotte.

Tout au long des ses aphorismes, le lecteur est invité à découvrir un Jules Renard particulièrement attentif à lui-même, conscient de ses défauts, en proie aux doutes sur son travail et sur sa vie d’homme plus largement. Ce qui frappe, c’est la sincérité avec laquelle il se dépeint et son refus de tout artifice littéraire. Simplicité, c’est ce que semblent prôner ces Notes émouvantes d’authenticité.

« Les mots ne doivent être que le vêtement, sur mesure rigoureuse, de la pensée. »

Et c’est dans cette ascèse stylistique que Jules Renard s’exprime et se cherche, à l’instar de Montaigne dans ses Essais. Littérateur à la plume acerbe, il n’hésite, toutefois, pas à utiliser l’art de la pointe pour souligner les ridicules de son temps. « Pas de génie, mais de petits génies éphémères. ». De même, il partage, avec franchise, son avis sur d’autres auteurs : « Il faut que notre Journal ne soit pas seulement un bavardage, comme l’est trop souvent celui des Goncourt. »

Parfois, au détour d’une réflexion, Renard fait part de son accablement au lecteur. « Jamais je ne me suis senti à ce point incapable de quoi que ce soit. » Puis, vient le bonheur : « Les heures où, comme un poisson dans l’eau, je me meus à l’aise dans l’infini. »

Ces Notes de Jules Renard sont comme lui : complexes, drôles et authentiques. Y plonger, c’est en ressortir le sourire au coin des lèvres et penser, de concert avec lui, que :

«La vie, je la comprends de moins en moins et je l’aime de plus en plus.»

Notes sur le métier d’écrire, Jules Renard, L’Anabase, 56p., 9 euros

  • 18 février 2015