Laborde, un aphoriste musicien

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« Pourquoi rougir d’avouer qu’on s’est trompé? n’est-ce pas déclarer qu’on est plus sage aujourd’hui qu’on ne l’était hier? »

Mais qui est donc ce Jean-Benjamin de Laborde qui a fait de l’aphorisme son mode d’expression privilégié tant sur le plan musical que littéraire ?

Né en 1734, il étudie la composition avec Rameau, met en scène des opéras et se fait historien de la musique. Favori de Louis XV, il occupe successivement les charges de receveur général des finances et fermier général. Polygraphe, il compose avec un égal talent des chansons, des mémoires historiques et également des pensées et des maximes.

Ce musicien original se fait, dans ses Chansons, l’apôtre d’un art de la brièveté. En témoigne cet extrait magnifiquement interprété par le Trio Dauphine et la chanteuse Maïlys de Villoutreys :

Véritable redécouverte du répertoire du XVIIIème siècle, les chansons de Laborde n’excèdent jamais quelques minutes et laissent entendre les facultés délicates et sublimes de son compositeur.

Parallèlement à sa carrière musicale, Laborde rédige des maximes de facture classique mais dont la pointe est particulièrement savoureuse. Jugez vous-mêmes :

« Nous poussons simplement la porte à la flatterie, mais nous ne la fermons jamais. »

« Les visages les plus gais se voient dans les carrosses de deuil. »

Délivrant une vision pessimiste de l’homme, il se détache des Maximes de la Rochefoucauld dans son intérêt pour l’amitié ou l’amour.

« Il est des yeux avec qui on entre d’abord en conversation. »

« L’amitié reçoit les confidences de l’amour ; l’amour reçoit-il les confidences de l’amitié ? »

Classique, il fustige, toutefois, les avares, les sots et les orgueilleux et trouve le vice là où croit se cacher la vertu.

« L’avare est un arbre stérile. »

« Tout est au-dessus de l’homme vicieux, tout est au-dessous de l’homme vertueux. »

Orfèvre des mots et de la musique, Jean-Benjamin de Laborde met son talent au service d’une esthétique de l’épure. Aphoriste aux mille facettes, il a également composé la musique d’un ballet dont l’un des librettistes n’est autre que Chamfort, autre maître du genre.

Espérons donc que ces Maximes et pensées feront, dans l’avenir, l’objet d’une réédition et saluons l’initiative prise par le Trio Dauphine de nous faire redécouvrir une partie du répertoire de cet aphoriste musicien.

« On cherche la vérité, on ne la trouve point, mais on s’aperçoit de ses erreurs ; c’est beaucoup. »

Pensées et maximes, Jean-Benjamin de Laborde, disponibles sur Gallica

  • 17 août 2015
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